Digérés les festins, éteintes les chandelles
La fête est terminée, la vie reprend son cours
Les pantins colorés ont perdu leur ficelle
Les manèges partout en sont aux derniers tours
Et moi je suis comme eux meurtri de solitude
Espérant pour bientôt des lendemains meilleurs
Si la monotonie devient triste habitude
Il est temps de rêver au retour du bonheur.
Il se peut qu’en secret le printemps se prépare
Et que quelques rameaux commencent à frémir
Mais de chants, de refrains les oiseaux sont avares
Le froid tenaille ceux qui n’ont osé partir
Les hommes sont saoulés de nouvelles mauvaises
Noircissant les journaux, affolant les écrans
A force d’être assis coincé entre deux chaises
Ils ne savent plus rien du pourquoi du comment.
On leur a tout promis ils attendent encore
Aujourd’hui est pareil à ce qu’était hier
La mort rode toujours qui ronge, qui dévore
Quand donc finira-t-il ce redoutable hiver.
J’écris pour oublier que le temps passe vite
Qu’il attend impatient le dernier de mes mots
Quelques lettres pressées péniblement écrites
Au moment de tirer malgré tout le rideau.
Seront-elles d’amour il me plait de le croire
Même si je l’avoue il m’a déçu parfois
Même s’il m’a valu pas mal de nuits trop noires
Quand il voulait s’enfuir et s’éloigner de moi.
Seront-elles prénom rappelant un visage
Un sourire un parfum un beau soleil couchant
Ceux qui font le bonheur des carnets de voyage
Que nous offre la vie de printemps en printemps.
Seront-elle regrets de n’avoir pu tout faire
Et d’avoir laissé là sur le bord des chemins
Ces rêves merveilleux devenus des prières
Tant de fois répétées, toujours dites en vain.
Seront-elles de joie la chose n’est pas sûre
La joie c’était avant, il est déjà bien tard
Les mots les plus heureux étaient faits de murmures
Promesses échangées à travers un regard.
Pourtant j’écris toujours et si j’écris encore
C’est qu’il me reste au cœur de l’amour à donner
Quelques gouttes de vin tout au fond d’une amphore
Et ce reste d’espoir que je veux partager
Ecris-moi tous tes mots d’amour
Si tu ne sais pas trop qu’en faire
Ajoutes-y quelques toujours
Pour les rimes c’est une affaire.
Dessine-moi un joli cœur
Rouge sang au bas de la page
Ou même une petite fleur
Un soleil entre ses nuages.
Parfume tout d’un peu de miel
D’un joli bouquet de lavande
Conduis-moi au septième ciel
Sans même que je le demande.
Laisse tomber ces interdits
Et brise-les toutes ces chaînes
Comme si tout était permis
Fais toi princesse, fais-toi reine.
Libère ton âme et ton corps
De ces habits qui les oppressent
Révèle-moi tous tes trésors
Le temps va vite, le temps presse.
N’attendons pas qu’il soit trop tard
Que la vieillesse nous condamne
A vivre entre nuit et brouillard
Avant que les roses ne fanent.
Imaginez soudain une terre moins ronde
Sans le moindre soleil venu la réchauffer
Serait venu le temps de cette fin du monde
Qui signerait le deuil de notre humanité.
Les hommes seraient là à prier tous ensemble
Implorant le salut auprès de quelque dieu
Ils connaîtraient la peur, cette peur qui rassemble
Victimes et bourreaux, nantis et miséreux.
Ils devraient tout laisser les palais, les richesses
Se retrouveraient nus tout comme au premier jour
Se pourrait-il alors qu’un sursaut de tendresse
Leur fasse brusquement réinventer l’amour.
Cet amour qu’ils avaient condamné à l’absence
Au profit de l’argent devenu beau parleur
Quand les plus beaux discours ne sont plus qu’insolence
Et quand la joie de vivre a fait place à la peur.
Qui peut savoir alors ce que ferait la terre
Nous accorderait-elle un quelconque sursis
Ferait-elle au soleil une ultime prière
Pour qu’il daigne à nouveau faire obstacle à la nuit.
Imaginez, mais non tout ça n’était qu’un rêve
Un de ceux par pudeur qu’on nomme cauchemar
Pourtant j’entends un cri, un long cri qui s’élève
Tout peut être sauvé, il n’est jamais trop tard.
Le printemps reviendra fait de mille bonheurs
De cohortes d’oiseaux gazouillant dans les branches
Le printemps reviendra, c’était juste une erreur
Sur quelque dieu le diable aurait pris sa revanche.
Et nous repartirons sur les mêmes chemins
Retrouver ces plaisirs, libérés de nos chaînes
Le temps fera son œuvre et de nouveaux matins
Coloreront de bleu les souffrances anciennes.
L’histoire est jalonnée de malheurs et de maux
Remplissant à loisir les pages de nos livres
L’homme est toujours vainqueur, jamais aucune faux
N’a pu anéantir sa folle envie de vivre.
Aux faiseurs de chagrin, aux prophètes obscurs
Je préfère aujourd’hui les porteurs d’espérance
Qu’ils la disent partout, l’écrivent sur les murs
En fassent des chansons pour tromper le silence.
Il reste sur les lèvres un parfum de baisers
Des notes de couleur sur les robes des filles
La paix n’a pas quitté son rameau d’olivier
Le ruisseau court toujours à travers les jonquilles
Le printemps reviendra fait de mille bonheurs
De cohortes d’oiseaux gazouillant dans les branches
Le printemps reviendra, c’était juste une erreur
Sur quelque dieu le diable aurait pris sa revanche.
Je suis tombé par terre et j’ai pas vu Voltaire
Le nez dans le ruisseau il était où Rousseau
C’est bien toujours pareil quand survient la misère
L’amitié se fait rare et vous tourne le dos.
Faut pas compter non plus sur ce bon Lamartine
Occupé par son lac il ne répondra pas
Et puis le romantisme au final ça vous mine
Ca vous laisse impuissant face au moindre combat.
Me restent bien Rimbaud et son copain Verlaine
Chez Baudelaire ils vont cueillir les fleurs du mal
Alors les déranger c’est pas vraiment la peine
Ils seraient aussi sourds que le dormeur du val.
Je me dis que Villon s’il était de passage
Pourrait me dépanner lui le mauvais garçon
Condamné pour délit de grand vagabondage
Habitués aux vers autant qu’à la prison.
Ronsard n’en parlons pas ça n’est pas raisonnable
Pas plus que Du Bellay ou Malherbe ou Prévert
J’ai bien de leurs bouquins au fond de mes cartables
Je les ai très peu lus et je n’en suis pas fier.
Vers qui donc se tourner quand la muse s’épuise
Ou quand elle a choisi un tout nouvel amant
Faut-il en rester là, est-ce partie remise
Demain tout reviendra, tout sera comme avant.
Feuille jaunie légère et frêle
Finiras-tu par les quitter
Tous ces grands arbres qui chancellent
Lorsque l’automne est arrivé.
Amour, des ces tristes décombres
Daigneras-tu enfin surgir
Toi qui n’est guère plus qu’une ombre
Au rendez-vous des souvenirs.
Et toi mon cœur voudras-tu battre
Aussi fidèle et fort qu’avant
De ces cendres restées dans l’âtre
Feras-tu des charbons ardents.
Vieillesse auras-tu le courage
D’oser même s’il est trop tard
Partir pour un autre voyage
Qui ne mènera nulle part.
Poète écriras-tu l’histoire
De ce fou qui voulait encor
Faire semblant, semblant d’y croire
Comme feuille sur l’arbre mort.
La vie finalement ça n’est qu’une croisière
En superbe voilier, en immonde rafiot
Que l’on soit promeneur ou marin de carrière
Il est sûr qu’un beau jour on finira dans l’eau.
On s’accommode tous de l’incertain voyage
On fait comme l’on peut quand le ciel se fait noir
On cherche l’équilibre, on s’accroche aux cordages
On prierait même Dieu pour un zeste d’espoir.
On cherche le soleil, on s’agite, on s’enivre
De vins et de parfums, de sourires amis
C’est pas finalement difficile de vivre
Même en ne l’ayant pas totalement choisi.
A bord tout est servi le bon, le détestable
Le chef a travaillé il a fait de son mieux
Mais malheureusement nous sommes tant à table
Que les plus belles parts sont pour les plus chanceux.
Les autres, malheureux, n’auront droit qu’à des restes
Et l’eau le plus souvent servira de grand cru
S’il est des animaux malades de la peste
Il en est quelques-uns qui ne la craignent plus.
Pour tous arrivera le jour où tout s’écroule
Les plus beaux paquebots résistent mal aux vents
Nul ne peut échapper au courroux de la houle
Les croisières c’est beau mais ça finit pourtant.
J’en ai vu des Noël sans neige toute blanche
J’en ai vu des étés sans soleil tous les jours
J’en ai vu des lundis qui semblaient des dimanches
Des fêtes attendues qui parfois tournaient court.
J’en ai vu des pardons qui n’étaient que sentences
Et des palais dorés qui n’étaient que prisons
Des justices rendues sans souci de balance
Et des poignées de main marques de soumission.
J’en ai vu des soldats qui détestaient la guerre
Des médailles données qui se voulaient cadeaux
Quelques voiles jetés qui cachaient la misère
De vastes océans réduits en gouttes d’eau.
J’en ai vu des enfants qui jouaient les adultes
Des vieillards affaiblis redevenus enfants
Même des mots d’amour se muant en insultes
Quelque serments aussi tragiques faux semblants.
A y bien réfléchir tout est à double face
Bien malin celui-là qui sait le faux le vrai
Est-ce bien un sourire ou juste une grimace
Est-ce un cruel remords ou un petit regret.