Je sais bien qu'un beau jour, usé par mes voyages,
Je ne serai plus rien qu'un vieillard fatigué,
Je revivrai, songeur, dans mes livres d'images
Mes batailles perdues et mes combats gagnés.

Toi, tu me comprendras, diras ce n'est pas grave,
Il est du charme aussi dans tous ces vieux gréements,
Corsaires, flibustiers, même marchands d'esclaves
Ont droit à ce repos que l'on dit des amants.

Alors je revivrai et, trouvant quelque force,
Je te prendrai la main tout comme au premier jour,
J'essaierai de trouver sous le froid de l'écorce
Un peu de ce sang chaud qu'on appelle l'amour.

Tous deux nous referons sur une mer immense,
La croisière attendue de tendresse et de mots,
Sur le pont du bateau une dernière danse
Comme au temps, souviens-toi, où nous étions si beaux.

Tu verras un ciel bleu caché sur l'autre rive,
Celle que l'on atteint sans s'en apercevoir,
Nous serons ce voilier qui lentement dérive,
Recherchant une crique où s'abriter le soir.